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Les Maliens du Cameroun au secours du Nord

"Crédit photo: Josiane Kouagheu"
« Crédit photo: Josiane Kouagheu »

Que fera-t-on maintenant que le Nord a  été conquis ? Que fera-t-on des milliers de réfugiés qui ont fui les islamistes ?  François Hollande s’est rendu au Mali. Il a été clair : le Nord doit rester vigilant. L’armée Malienne peut-elle assurer le relais ? Conscients de cette reconstruction dont nécessite leur pays, les ressortissants Maliens du Cameroun ont décidé d’agir…

 «Loin des yeux, loin du cœur ?». Dans le regard d’Abdoulaye Sanogo, ce célèbre  adage semble être une parole de vent. Son regard a une autre explication, un autre secret : «Loin des yeux, près en cœur». Son regard traduit exactement cette phrase. Abdoulaye n’a pas oublié les siens restés au Mali. La crise, les morts, la panique, le quinquagénaire sait de quoi il s’agit. Propriétaire d’une boutique de vêtements à Douala, Abdoulaye passe toutes ces journées l’oreille collé à son poste radio. Depuis neuf mois, il a entendu des choses sur son Mali natal.

Les plaies encore vives

«J’ai perdu mon grand-frère qui vivait à Kidal. Ces islamistes sans foi ni loi l’ont tué», dit-il le regard perdu dans les vagues, comme pour se remémorer les vieux souvenirs passés ensemble. Pour l’instant,  Abdoulaye n’a qu’un souhait, que son pays recouvre sa paix d’antan. Qu’il redevienne le Mali cohésif, chaleureux qu’il a connu avant son arrivée au Cameroun en juin 1983. Même si le Nord de son pays a été conquis, Abdoulaye garde une plaie encore si vive de cette guerre qui l’a  paralysé pendant neuf mois. Au lieu-dit Camp malien au quartier Makea à Douala (quartier où les maliens sont plus nombreux), les Maliens tassés par dizaine discutent de la crise. Leur drame, interne pour la plupart, n’est pas différent de celui d’Abdoulaye. Les informations qu’ils suivent au téléphone sont satisfaisantes.

"Crédit photo: Josiane Kouagheu"
« Crédit photo: Josiane Kouagheu »

Le regard voilé, la voix enrouée, Betté confie qu’il n’a plus de nouvelles de ses parents, de ses deux oncles et de ses quatre tantes vivant à Kidal

Seulement, la plaie n’est pas encore refermée. C’est que, certains d’entre eux ont vécu directement cette crise. Moussa Ibrahim, 26 ans est l’un d’eux. Il nourrit le même rêve qu’Abdoulaye. Moussa a perdu son oncle et son neveu. Ils vivaient à Tombouctou, ville située au Nord. Depuis neuf mois, Betté n’a plus de nouvelles de sa famille. Le regard voilé, la voix enrouée, il explique qu’il n’a plus de nouvelles de ses parents, de ses deux oncles et de ses quatre tantes vivant à Kidal. «Papa m’appelait toujours pour me demander de l’argent, ainsi que maman. Même mes tantes. Personne ne me fait plus signe depuis août 2012». Nous étions alors le 25 janvier 2013. Au téléphone, plus d’une semaine plus tard (2 février 2013), Betté me raconte la même histoire. « Je n’ai toujours pas eu de leur nouvelle». Une situation que vit Cissé Moussa Sarakolé, qui n’a pas de nouvelles de sa tante vivant à Bourem, un village situé non loin de Gao depuis le mois d’octobre 2012. Ces incertitudes, ces craintes,  ont poussé les ressortissants du Cameroun à d’agir.

De l’argent, du sang, pour le Nord

Dimanche 27 janvier 2013, j’ai assisté avec eux à l’assemblée générale organisée pour trouver une solution au consulat général du Mali au Cameroun, situé au quartier Bonapriso à Douala. Au cours de cette soirée, ils ont pris de nouvelles résolutions : chaque ressortissant devait contribuer une somme d’argent en fonction de son activité. Cette somme  varie entre 200 000 F.Cfa et 2 000 F. Certains volontaires ont offert un million de F.Cfa, d’autres plus. Certains qui avaient des proches au pays, ont envoyé une nouvelle : « contribuez en nature ». Ainsi, Abdoulaye m’a dit qu’il a demandé à ses deux enfants (des garçons), étudiants à Bamako, d’offrir leur sang aux soldats nécessiteux. Plusieurs autres Maliens de Douala ont envoyé le message. «Le pays est en difficulté. Tous les Maliens ont l’obligation de répondre à l’appel d’aide lancé par le président, Dioncounda Traoré», m’a dit  le vice-consul du Mali au Cameroun, Mahamadou Ouedraogo.

3 600 000 F.Cfa en juin 2012 pour les réfugiés

En juin 2012 déjà, les Maliens du Cameroun avaient envoyé la somme de 3 600 000 F.Cfa dans leur pays. «Cette somme avait servi à nourrir des réfugiés. C’est très important pour nous de le faire.  Maintenant, nous allons envoyer de l’argent et d’autres denrées alimentaires à nos soldats et aux réfugiés», explique Koulibaly Seidou, le vice-président des Maliens du Cameroun. Ils rêvent surtout de leur Mali d’avant. Pacifique, chaleureux, hospitalier et …laïc. «Maintenant nous devons reconstruire le pays avec tous les fils et filles du pays. Nous devons ne sommes plus touaregs, arabes, noirs…Nous sommes Maliens», se disent-ils, convaincus.

 

 


Djébalè: une île oubliée derrière Douala

Cette étendue de terre émergée dans le Wouri, l’un des plus grands fleuves du Cameroun, est abandonnée à elle-même. Ses habitants n’ont ni eau potable, ni électricité…Découverte par les Allemands en 1800, elle est pourtant située à Douala, porte d’entrée et de sortie de la sous-région Afrique centrale.

« Vous connaissez Djébalè ? ». Posez cette question à 100 Camerounais, 98 répondront: « heu, c’est quel quartier déjà ? ». D’autres vous diront: « ah oui c’est le petit village situé quelque part là ? ». Quelque part là sans plus. Voilà comment ils parlent de l’île de Djébalè, une étendue de terre émergée dans le Wouri, l’un des plus grands fleuves du Cameroun. Cette  île est pourtant située en plein cœur de la capitale économique du Cameroun, Douala, porte d’entrée et de sortie de la sous-région Afrique centrale. Comment ont-ils pu oublier un village pareil ? Serait-on tenté de se demander. C’est que, l’île n’a pas connue de développement depuis la période coloniale. C’est un village occupé par  le peuple Sawa, les Douala comme on les appelle ici. C’est surtout un village perdu dans Douala…

"Crédit photo: Josiane Kouagheu et Marie Louise Mamgué"
« Crédit photo: Josiane Kouagheu et Marie Louise Mamgué »

De la pirogue pour se rendre à Djébalè

Lorsque le simple voyageur veut se rendre sur l’île, il rencontre des difficultés au niveau du transport. Hormis les samedis matin et soir, aucune autre pirogue ne se rend à Djébalè, sauf pour des occasions rares. Le visiteur commence donc par chercher son « piroguier ». Une équation difficile à résoudre. En effet, le piroguier que l’on trouve fait un aller et retour. On le prend donc en course. Il faut payer le prix! ( plus cher à pirogue à moteur et moins cher à pirogue à pagaie). Après accord, le voyage peut commencer. Le départ a lieu sur les berges de Bonassama, quartier qui jouxte Djébalè.

Un paysage féérique

Le voyageur est ébloui par ce qu’il rencontre. Le paysage est à couper le souffle. Entre les cocotiers aux branches longues qui balaient la surface de l’eau et la mangrove innocente, son regard se régale de la pudeur de l’espace. Il est bercé par les chants des oiseaux multicolores qui s’envolent au dessus de lui. Lorsque sa pirogue rencontre une autre, il entend  des  «Mone (bonjour) », « E-mala-ne » (comment ça va ?) » par-ci et des « Wala bwam (au revoir) » par-là. Une manière de célébrer la rencontre en mer.

"Crédit photo: Josiane Kouagheu et Marie Louise"
« Crédit photo: Josiane Kouagheu et Marie Louise »

Il était une fois, en 1800

15 minutes plus tard (s’il a pris la pirogue à moteur), il voit au loin, apparaître les premières maisons de l’île. Pur style colonial. Plus proche, il remarque des murs défraîchis et les toits jaunis par la force du temps, les premières maisons de Djébalè. Et lorsque la pirogue accoste, des maisons, construites pour la plupart en matériaux provisoires sont visibles. A la chefferie, le chef du village, Isaac Dibobe vous accueille. « Bienvenu à Djébalè », vous dit-il d’entrée de jeu. Et là, comme un conteur autour du feu, il vous raconte l’histoire de son île qui l’a vu grandir il y a plus d’un demi-siècle. Issac Dibobè (il faut préciser sa majesté), vous amène sur la route de son île. « C’est en 1800 que les Allemands ont découvert Djébalè durant leur présence au Cameroun « .

Au départ, une femme sirène nommée Djobalè. Et aujourd’hui, un village sans eau, ni électricité…

Le nom de l’île est trouvé par l’épouse du 1er noir à arriver sur les lieux. La légende dit qu’il sortait avec une femme sirène nommée Djobalè. Une femme avec laquelle il aurait eu plusieurs enfants. D’où le nom Djébalè. Malgré cette histoire si merveilleuse, le village est malheureux. « Nous n’avons pas d’eau potable, encore moins d’électricité », explique le chef Issac Dibobé, les larmes aux yeux. L’unique source d’électrification dont dispose l’île est l’énergie solaire. Un dispositif insuffisant vu l’espacement des maisons.

 

"Crédit photo: Josiane Kouagheu"
« Crédit photo: Josiane Kouagheu »

Une seule école, un sol riche en pétrole et l’exode rural!

La seule école de l’île est l’école publique de Djébalè. Après l’obtention de leur Certificat d’études primaires (Cep), les jeunes vont poursuivre leurs études ailleurs. D’autres ne reviennent jamais, arguant qu’il n’y a pas « de distraction sur l’île ». Seuls les vieillards et des pêcheurs restent à Djébalè. Leurs femmes cultivent du manioc, des plantains et des grains de courge. Chaque samedi, elles vont au marché de Bonassama (à 200 F.Cfa de transport) écouler leur marchandise.  Le sol riche en pétrole n’est pas encore exploité. A quelques mètres de l’île, d’autres quartiers de Douala vivent avec de l’eau, de l’électricité et des d’écoles. Djébalè semble être l’orphelin d’une mère qui aime seulement « certains de ses enfants » …

Situation:

Nom: Île de Djébalè

Emplacement: Arrondissement de Douala 4ème 

Superficie: 80 hectares

Population: 800 âmes

Langue: Duala


Une semaine au Camer: Entre justice populaire, homosexuels acquittés et pirates arrêtés, le Cameroun a vécu ses sept jours

« Josiane viens voir. Ils sont entrain de brûler un malfrat. Viens vite ! »

Brice vient de briser ma grasse matinée. J’aurais bien voulu dormir ce samedi (11 janvier). J’ai même tenté d’ignorer les sonneries de mon téléphone sans succès. Mais, comme toujours, Brice vient encore de débusquer un fait divers croustillant et il veut le partager avec moi. Un ami qui cherche toujours à me mettre au parfum des petites infos du quartier. Juste le temps pour moi d’enfiler un « kaba », je suis déjà sur les lieux. La scène se déroule à environ 10 mètres de ma maison. Et là, une foule m’accueille. Devant elle, un corps se bat entre les flammes. L’odeur humaine envahit l’air. Des mouchoirs et autres tissus trouvés à la hâte sont utilisés comme cache-nez. Brice que j’ai pu retrouver s’approche de moi. « Les bandits n’ont vraiment pas peur. Deux autres ont été brûlés au même endroit il y a à peine quatre jours. Tu t’en souviens Josiane? ». Bien sûr. Comment oublier ce jour où deux jeunes garçons qui n’avaient pas encore épuisés leur quart de siècle sur terre ont vu leur vie s’achever dans les flammes?  Encore une justice populaire à Douala. Je lis dans les regards, une joie indescriptible. Les habitants viennent de mettre hors d’état de nuire un camerounais nuisible. Les deux complices du malheureux voleur de bâche de camion se sont enfuis. Il a été lynché à coups de gourdins avant d’être brûlé vif. « Ces malfrats violent nos femmes et emportent nos biens. Nous ne pouvons plus supporter », lance un habitant, visiblement à bout.

Contrairement à Douala, les pirates de la péninsule de Bakassi au Cameroun, ont eu plus de chance. Ils n’ont pas subi de justice populaire, tout juste ont-ils été emprisonnés. Comme l’apprend le quotidien Le Jour, deux pirates nigérians et deux complices ont été arrêtés sur l’île par des forces de l’ordre. En une semaine, le Cameroun n’a pas seulement eu des histoires de vol. En feuilletant les journaux, j’ai constaté des informations diverses.

Deux homosexuels acquittés, réfugiés Centrafricains en pleurs, Français morts

Durant sept jours, le pays de Roger Milla a bougé. Deux « homosexuels » ont été acquittés. Jonas Singo Kome, 20 ans et Francky Djomo, 19 ans, accusés d’homosexualité en juillet 2011 (ils avaient été surpris entrain de s’embrasser dans une voiture) et incarcérés depuis lors à la prison centrale de Kondengui à Yaoundé, ont été reconnus non coupables lundi 7 janvier 2013. Me Alice Nkom, leur avocat, exprime d’ailleurs sa joie dans les colonnes du Jour. Une joie que des réfugiés Centrafricains sont loin de ressentir. Normal! Comment se comporte-t-on lorsque son père, sa mère, ses frères…sont quelque part, face aux rebelles? Ils étalent leur inquiétude, la douloureuse séparation avec leur famille, dans Le Jour. Ils ne savent d’ailleurs pas si leurs proches sont encore en vie ou morts.

Mort! Le mot est lâché. Deux Français ont perdu la vie au Cameroun cette semaine. Claudio Calinam, un volontaire de l’ONG « Planet urgence » a disparu depuis lundi 17 décembre 2012 dans un cours d’eau au parc national de la Bénoué au Nord Cameroun. D’après le quotidien Mutations du 8 janvier 2013, l’information a été confirmée par le consul honoraire de France, Pierre Barbier. Un autre Français, Jacques Dubuisson, a été retrouvé mort dans sa cellule à la prison centrale de New-Bell. Les circonstances de sa mort ne sont pas encore connues. Il faut rappeler qu’il avait été condamné en octobre 2012 à 20 ans de prison pour l’assassinat de son épouse, Marie-Thérèse Ngo Badjeck.

Lionel Messi couronné, Samuel Eto’o conté

La semaine n’a pas été que triste. Loin de là. Les maîtres du ballon rond, Lionel Messi et Samuel Eto’o l’ont rendue joyeuse. J’ai lu avec plaisir, dans la Nouvelle Expression, le sacre de Lionel Messi. Le quotidien de la rue Jamot n’est pas passé par quatre chemins pour saluer l’entrée dans le club de « légende » (4 fois ballon d’or) du joueur argentin du Fc Barcelone. Autre histoire, autre maître du ballon rond: Samuel Eto’o. Le quotidien « L’Actu » a fait un tour dans la vie du joueur le plus payé au monde. Sa vie y est contée comme un conte de mille et une nuit. Notamment, ses premiers pas dans le foot et ses entrées dans les clubs les plus prestigieux d’Europe (Fc Barcelone, Real de Madrid…).

Voilà une semaine (du 7 au 13 janvier 2013) que j’ai vécue intensément au Cameroun, mon pays, pour vous…

Josiane Kouagheu


2013: meilleure ou pire que 2012?

2012 s’en va! 2013 est là. Le meilleur reste à venir. Demain est un nouveau jour…

Moi j’aurais voulu dire que 2013 allait m’apporter ce que je n’ai pas pu obtenir en 2012. C’est vrai que  2013 bénéficie encore de la présomption d’innocence. Et dire que cette année sera moins bonne que 2012 sera exagérée. Seulement, des histoires de cette année 2012 que j’ai décidé d’appeler « le défi des mayas » restent encore vivantes dans ma mémoire. Je veux bien comprendre le pourquoi des choses. Pourquoi? Pourquoi?…Maman m’a dit qu’on ne peut avoir des réponses à toutes les questions. Mais je me pose quand même des questions.

Bon je récapitule. Je commence par ce qui me tient à cœur. Ces histoires qui m’ont marquée au fer rouge.

La plus récente: India’s daugther, entendez la fille de l’Inde. Un viol qui secoue l’Inde. Un acte qui m’écœure. Comment comprendre cette acte, une jeune fille de 23 ans soumise à un viol collectif de six hommes en ce mois de décembre 2012. Il était temps que l’Inde fasse une dénonciation « publique ». Sonia Ghandi a promis des mesures fortes. Il était temps…

Au Cameroun, Elsa Tambou a été violée pendant 10 ans par son père. Elle a osé dénoncer son géniteur pour sauver les prochaines victimes, comme India’s daugther. Elle a eu un courage que certaines femmes camerounaises n’ont pas eu. Elles n’ont jamais voulu dénoncer leurs hommes qui les battait et elles ont perdu la vie.

Et les guerres? Et la mort?

D’autres choses m’ont marquée. Des histoires du monde. Et Bangui et ses rebelles. En ce moment, moi je me moque de ceux qui pensent que 2013 sera meilleure. Afin je m’interroge…

Que fera-t-on des populations en danger? Et ces enfants? La tuerie de Newton aux États Unis m’a traumatisée. Je ne savais pas que des actes pareils pouvaient encore se dérouler au 21ème siècle. Je me rappelle de ce fameux jour. Je suivais la radio Rfi lorsque ce crime a été annoncé. Comme sur Hiroshima. Maman qui d’habitude ne prête pas attention à mes exclamations quand j’écoute des informations à la radio s’est arrêtée. « Que se passe-t-il? M’a-t-elle demandé. Et moi j’ai juste dit « rien maman ». Je ne voulais pas que son cœur fragile encaisse un coup fatal pareil. Je connais son amour maternel. Je voyais seulement des innocents qu’un mois de décembre 2012 emportait. Des enfants qui n’ont pas pu ouvrir leur cadeau de noël. Et comme si cela ne suffisait pas, les canons continuent de sévir. Leur cri résonne dans le couloir de la mort.

En Syrie, les larmes des mamans dont les fils sont morts peuvent inonder une rivière. Que faire? Et le Nord-Mali? Le Mali semble couper en deux…Une population jadis unie. Moi je connais la collaboration Africaine. Je n’ose même pas imaginer ce que je ferai si on me disait que je ne pouvais plus voir mon ami qui est à Bangou (Ouest Cameroun), ma camarade de classe qui est dans le Nord-Cameroun. Honnêtement, je n’ose imaginer. J’ai si peur pour le Mali. Et la paix ivoirienne, doit-elle s’imposer?

Je sais que certains comme moi, ont perdu leur proche en 2012. Je pense à Laurine qui a perdu son père, à Maurice, Mamadou Coulibaly de la Côte d’Ivoire….Mes condoléances.

Quelques évènements heureux ont embelli 2012. Des joies de courte durée, parfois de longue durée. En tout cas, 2012 s’en va! 2013 est là! Le meilleur reste à venir. Demain est un nouveau jour…

Bonne et heureuse année 2013 à vous, vous qui avez partagé mes billets, mes doutes et surtout mes espoirs sur www.mondoblog.org, sur facebook, twitter, atelier.rfi.fr.

 


Violence Masculine: des femmes camerounaises qui ne verront pas 2013

Battues, certaines ont succombé aux coups de leurs époux, fiancés, petits amis en 2012. D’autres gardent des séquelles physiques toute leur vie.

 

La peur de dénoncer domine

 En cette soirée de samedi du mois de décembre 2012, plusieurs personnes sont en larmes devant un domicile au quartier Bilongué, à Douala au Cameroun. « Je ne peux pas le croire. Non! », s’écrie une femme, qui écoutait une minute plus tôt le témoignage d’une autre. « Non! », poursuit-elle. Une autre, préfère aller voir pour croire. Et là, devant le fait, des larmes jaillissent inconsciemment sur son visage.

 Devant ce corps filiforme baignant dans une mare de sang, les seins déchiquetés, les parties intimes sorties de leur cachette, elle ne parvient pas à retenir sa douleur. « Elle avait toute l’avenir devant elle. Quel monstre », lance-t-elle en pleurs. Elle, c’est Fanny Metafeu, 20 ans. Le monstre, son petit ami, Eric Djomo, 32 ans. Le spectacle affecte les cœurs les plus endurcis. Nul ne résiste à la sauvagerie du geste.

Fanny Metafeu a succombé aux coups de son petit ami, Eric Djomo. La jeune fille  a été battue avant d’être froidement poignardée par ce dernier. Ses seins déchiquetés prouvent le passage de plusieurs coups de poignards. Ses parties intimes, le même calvaire. « Mon Dieu! Elle a souffert avant de mourir », lance un homme, la voix enrouée. Eric Djomo, son petit ami,  n’a pas accepté  la séparation. Fanny Metafeu ne voulait plus de lui. Depuis deux mois, la jeune fille avait mis fin à leur relation. «Nous avons dissuadé Fanny de fréquenter ce garçon. Il la battait tous les jours, quand ils se rencontraient», raconte Jean-Bernard Nde, le beau-frère de Fanny Metafeu.  Comme Fanny Metafeu, de nombreuses femmes camerounaises ont succombé aux coups de leurs petits amis, fiancés et époux durant l’année 2012. Elles ne pourront pas voir 2013.

Son bébé a été volé

57 ans et Violée dans une cellule pour hommes

En effet, au petit matin du 9 octobre 2012.  Il est environ 4h 13 minutes. Hawa Ibrahim, une jeune fille âgée de 21 ans  est retrouvée morte au domicile de son petit ami au quartier Bonamoussadi à Douala. Elle vient ainsi de succomber aux coups de poignard de son copain. «Elle l’aimait trop », explique sa mère. Un amour qui lui a ôté la vie. Malgré l’arrestation de son copain, le mal est fait. Françoise Moukalla, 43 ans, a reçu le 18 avril 2012, un coup de poignard similaire dans la gorge. Elle était en pleine dispute avec  Romuald Edimo, 48 ans, son époux, dans leur chambre au quartier Bessengué à Douala. Après ce geste, l’homme s’est donné la mort. Avec un message sur leur penderie : « Y’a un temps pour tout. Vive l’amour ! ». A Bafoussam, à Garoua, à Yaoundé et dans d’autres villes du Cameroun, elles ont perdu leur vie en 2012, sous les coups de leur partenaire.

Certaines, comme Lucrèce Ngono Obia 57 ans, violée dans une cellule pour homme au commissariat du 2è de Yaoundé, et mère de sept enfants, ne parviennent pas à oublier 2012. Le regard perdu dans les vagues, indifférence à leur entourage, elles ne savent plus où elles se trouvent.

Et la mort ne tarde pas à priver des millions d’enfants de leur maman. Comme ce fut le cas cette année 2012

Selon l’Enquête Démographique et de Santé faite au Cameroun en  2004, 78% de femmes ont subi une violence physique modérée, 32% ont été giflées, 16% ont été poussées, traînées ou jetées par terre et 16% sont victimes de violences sexuelles. Ces femmes, sont battues tous les jours sans jamais broncher. Elles subissent au quotidien des violences qu’elles refusent de dénoncer. Elles préfèrent garder silence, de peur de trahir leurs époux, copains et fiancés. Evelyne Kouam est battue depuis 25 ans. Sur sa figure, les coups de poing de son époux ont laissé des cicatrices désagréables au fil des années. La sexagénaire n’a jamais trahi son époux.  «Depuis que je suis née, maman n’a jamais passé une soirée sans subir les coups de papa. Elle ne s’est jamais plainte. Elle nous a interdits de le dénoncer », explique sa fille de 19 ans. D’après la ministre de la Promotion de la Femme et de la Famille du Cameroun, Marie-Thérèse Abena Ondoa, ces femmes ont peur des réactions de leur conjoint et la honte du regard de l’autre. Du coup, elles préfèrent rester avec leur peine. Marie-Thérèse Abena Ondoa évoque surtout le silence des victimes et le manque d’action des institutions concernées. Elle explique que des milliers de femmes subissent au quotidien ces violences dans des foyers. Et la mort ne tarde pas à priver des millions d’enfants de leur maman. Comme ce fut le cas cette année 2012.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Violée pendant 10 ans par son père

Elsa II Jacqueline Nyate Tambou, âgée de 24 ans a subi les assauts de son géniteur pendant une décennie. Elle assure que ses trois sœurs ont subi la même chose. L’affaire est au tribunal…
Que se passe-t-il quand un matin, au lever du soleil, votre sœur, votre amie, votre confidente, vous dit ce qu’elle a subi pendant dix ans, une histoire que son merveilleux sourire dissimulait. Que dites vous à votre fille qui vous souffle à l’oreille sa vie durant une décennie. Et que vous entendez: « j’ai été violée pendant dix ans ». Pire, « par mon père ». Que répondez vous? Je n’ose imaginer la réponse.
« A force de coucher avec mon père, j’ai pris goût »
Que dites vous, lorsqu’au cours d’une audience au tribunal, elle lance: « à force de coucher avec mon père, j’ai pris goût ». Et un silence envahit la salle du tribunal de première instance de Bonanjo, à Douala, au Cameroun. Papa, Roger Claude Tambou, 54 ans, est  assis à un mètre d’elle, sur le banc des accusés. Personne n’ose bouger, de peur de dévoiler sa peine. De peur de lire dans le regard du voisin, une histoire similaire. C’est pourtant ce qu’Elsa II Jacqueline Tambou, 24 ans, a vécu. La jeune fille a subi pendant 10 ans, les assauts de celui qu’elle continue d’appeler « papa ». « Je dormais dans la même chambre que lui. Papa a commencé cela un soir », se souvient la jeune fille.
En effet, Elsa a 13 ans à l’époque. Elle vient de quitter le village de sa mère, Ebolowa, pour Douala, ville où vit son père. La petite fille est toute joyeuse à l’idée d’aller à l’école et de vivre enfin avec ce « papa » qu’elle a tant cherché. Ses camarades à Ebolowa avaient un père, pas elle. Elsa est loin de se douter qu’elle entre ainsi dans la gueule du lion. Dès son arrivée, elle dort dans la même chambre que papa. Des soirs, il la caresse. « Normal. C’est mon papa », pense-t-elle. Puis, un soir, elle ressent une douleur entre les jambes. Elle se réveille en sursaut. Elle tente de crier. Lui l’empêche de sa main. Et les  autres soirs, le même calvaire continue. Papa vit avec ses sœurs et frères, sans aucune femme.
« Je suis tombée enceinte une fois, papa m’a conduite chez une femme »
Elsa n’est pas libre. Son père ne la lâche pas. Chaque fois qu’elle sort, à son retour, il contrôle son slip. Il l’hume pour détecter l’odeur du sperme. Si c’est le cas, la jeune fille est bastonnée. Roger Tambou veut sa fille pour lui tout seul. Elle devient son objet sexuel et  les conséquences ne tardent pas à suivre. La jeune fille tombe enceinte. Son père prend peur. « Il m’a conduite chez une femme à Bependa (quartier difficile de Douala). Elle m’a donné un médicament qui m’a fait très mal au ventre. Et beaucoup de sang a coulé », se souvient-elle. Après l’incident, son père l’oblige à prendre des comprimés chaque fois après l’acte sexuel. Des pilules du lendemain. Les mots qui ont permis de découvrir le pot aux roses.

« Je ne crains pas que ma fille soit enceinte, elle prend des pilules de lendemain »
En effet, un week-end du mois d’avril 2012, Elsa décide d’aller à Kribi, ville balnéaire camerounaise, avec des amies. Elle ne met pas son géniteur au courant. Fou d’inquiétude, son père  se met à sa recherche. Il vient chez sa matrone, propriétaire d’un restaurant au quartier Bali à Douala. Il se met à l’expliquer qu’il n’a pas peur que sa fille tombe enceinte. Comment ? s’étonne-t-elle. Il lui dit qu’Elsa « prend les pilules du lendemain ». Ce qu’un père n’est pas sensé connaître. La matrone à la puce à l’oreille. De retour de son voyage, elle pose des questions à son employée. Elle veut comprendre. Elsa visiblement à bout se confie.  La matrone décide de ne pas laisser ce geste impuni.  Et le 25 avril 2012, une plainte est déposée au Commissariat de sécurité publique du 8ème arrondissement contre Grégoire Tambou. Il est ensuite mis sous mandat de dépôt à la prison centrale de New-Bell à Douala. «Enfin, justice a été faite», se réjouissent de nombreuses personnes. Elsa, elle, sait que tout ne sera jamais facile pour elle.
Le père incestueux épilait ses filles
Elle doit lutter pour elle et pour ses sœurs. Elle assure que sa petite sœur de 15 ans a été violée. Et les trois autres pourront l’être si son père n’est pas puni. « Il dort dans la même chambre que ma sœur (Yasmine Tambou, 15 ans). Je suppose qu’elle vit le même calvaire que moi », pense Elsa. Yasmine a d’ailleurs reconnu au cours d’une audience, que son père « les épilait souvent », ses sœurs et elle.Le tribunal de première instance s’est montrée incompétente. L’affaire a été renvoyée au tribunal de Grande instance du Wouri.
Que tranchera la fin? Elsa veut une seule chose, qu’on sauve ses sœurs. Même si son père est en détention provisoire actuellement, elle veut que justice soit faite. Il encourt jusqu’à 25 ans de prison. La salle d’audience est toujours pleine. Le Cameroun attend la fin de cette histoire d’inceste qui défraie la chronique. Le cas d’Elsa permettra peut-être aux autres filles qui vivent le même calvaire de sortir de l’ombre et de croire à la justice…