josianekouagheu

De Douala à Abidjan, la mort nous guette aux Urgences

« Je veux devenir médecin pour sauver des vies humaines ». Lorsque j’étais petite, mes ami(e)s, qui rêvaient pour la plupart de porter la blouse blanche, se justifiaient ainsi. A l’époque, ils se prenaient pour des petits « Jésus », des futurs héros et héroïnes de notre société. Tous voulaient devenir le bon médecin, celui qui sauve le malade, même le plus pauvre. « Je ne veux pas être comme ces médecins qui laissent mourir les malades parce qu’ils n’ont pas d’argent », me juraient-t-ils, la main sur le cœur. Certains sont aujourd’hui des étudiants en médecine. Seront-ils ces meilleurs médecins tant rêvés ? Je ne suis plus très sûre de la réponse.

Je ne veux pas être pessimiste, mais, en parcourant les urgences des hôpitaux de Douala, ma ville, des histoires me donnent des frissons.

« Mon petit frère de neuf mois s’était évanoui. Il respirait à peine. Maman et moi l’avions conduit à l’hôpital en pleine nuit. Je pensais qu’il allait mourir. Aux urgences de l’hôpital, on nous a demandé de payer 11 000 F. Nous avions seulement 8 000 F. Les médecins ont refusé de prendre l’argent. L’infirmière nous a dit : ‘‘si vous voulez, restez là et votre fils va mourir’’. Elle ne s’occupait même pas de nous ».

Urgences d'un hôpital à Abidjan. Crédit photo: ObservateursFrance24
Urgences d’un hôpital à Abidjan. Crédit photo: ObservateursFrance24

J’ai rencontré Anita dans un hôpital public à Douala. La jeune fille âgée de 21 ans m’a confiée son combat pour sauver son petit frère. Cette nuit-là, elle est sortie de l’enceinte de l’hôpital, les pieds nus, malgré l’heure tardive, pour aller chercher les « 3000 F » qui manquaient. L’argent est revenu à temps pour sauver son petit frère.

« Sans argent, sans soins »

Plus loin, c’est Christelle qui m’a parlé de sa grande sœur qui se tordait de douleurs aux urgences. On avait diagnostiqué une appendicite. Il fallait l’opérer. Mais, la famille n’avait que 150 000 F au lieu des 200 000 F demandés. « Ce matin-là, il n’y avait pas d’argent. On cotisait. On appelait la famille. On a pu réunir 150 000 F que le service des urgences n’a pas pris. Ils voulaient la somme complète. Ma sœur est entrée au bloc opératoire en pleine nuit. J’ai retenu ceci : ‘‘sans argent, pas de soins’’ », a conclu la jeune étudiante en histoire.

J’ai rencontré des personnes qui ont vu mourir leur papa, maman, frères, sœurs, tantes, oncles, proches aux urgences, faute d’argent. J’ai vu de mes propres yeux (ce sont des cas personnels), des malades mourir parce qu’après un accident, on les a conduits à l’hôpital. On n’a pas pris soin d’eux parce qu’il n’y avait pas d’argent. Ils s’étaient alors vidés de leur sang et avaient rendu l’âme sur place. La famille était arrivée trop tard, avec l’argent nécessaire. J’ai vu une femme enceinte, mourir aux urgences parce que son mari, en mission de travail, est arrivé trop tard avec l’argent nécessaire pour l’opération. « Vous auriez dû la soigner. Je n’aurais pas fui avec votre argent », avait-il lancé, la voix pleine de colère, le visage ruisselant de larmes.

J’ai vu, entendu, vécu, des cas…

Je pensais comme toujours, qu’ailleurs était mieux que chez nous. Hélas ! Lors de mon récent séjour en Côte d’Ivoire, j’ai compris que la mort nous guettait aux urgences, même au pays des éléphants.

Avant d’y aller, j’avais déjà entendu parler de l’affaire Awa Fatiga, ce mannequin ivoirien décédé aux urgences du Chu de Cocody par manque de soins. Certains disaient qu’elle était morte parce qu’elle n’avait pas assez d’argent pour payer ces soins. Lors de l’enregistrement « en plein air » de l’émission Priorité santé de Radio France internationale (Rfi), auquel j’ai assisté en tant que spectatrice, la ministre de la Santé et de la lutte contre le Sida ivoirienne était présente. Elle avait expliqué sa version des faits. Et d’après les témoignages des uns et des autres, j’ai compris que la situation ivoirienne n’était pas si différente de celle du Cameroun.

Des racketteurs aux urgences qui marchandent des services diverses. Au Cameroun, même le brancard, denrée rare, est payant. Des médecins qui ne font pas leur travail. Et encore, ces patients qui décèdent par manque d’argent et leurs proches qui en sortent traumatisés. La ministre a même dit ce jour qu’elle faisait des visites surprises pour surprendre ceux qui ne font pas leur travail. Près de moi, un homme ne cessait de lever la main pour réclamer la parole. Des blogueurs béninois, assis tout près,  lui disaient qu’il était arrivé trop tard car il fallait s’enregistrer pour poser des questions au ministre et autres.

« Mais pourquoi suis-je arrivé en retard ? Je devais raconter comment mon père est décédé dans un hôpital à Abidjan parce que je n’avais pas d’argent à l’instant pour payer ses soins. Je devais appeler mes frères pour qu’on cotise. L’argent est arrivé trop tard. J’ai tellement de cas à raconter. Plusieurs de mes amis ont vécu des situations pareilles. J’avais tellement à dire », se lamentait-il.

« Tu sais, le pouvoir c’est de l’argent. Avant, des médecins travaillaient pour le bonheur des malades. Mais aujourd’hui, l’argent vient avant tout. C’est le 1er patient. On dit que l’hôpital n’est plus la charité. Même à l’église, on ne joue plus au mendiant », a conclu un ami ivoirien.

NB : malgré ces cas des médecins véreux, intéressés uniquement par l’argent, je pense qu’il y a encore de bons médecins dans nos hôpitaux. Je pense à ceux qui pensent toujours que l’être humain « vivant » et en bonne santé n’a pas de prix. Merci à ceux qui se reconnaissent !


S’il te plaît maman, laisse mes seins tranquilles !

Mon billet était prêt depuis quelques jours. Je ne savais pas ce qui m’empêchait de le publier. J’avais de petites modifications à y faire. Soit ! Mais, de petites choses qui ne pouvaient me prendre plus de 10 minutes. Depuis ce matin, je sais ce qui me retenait de publier ce fameux billet. Il me fallait recevoir ce coup de fil. Comme d’habitude, l’une de mes amies, future ingénieure de son état, a voulu savoir comment j’allais. Et surtout, pourquoi ce silence sur mon blog depuis des semaines.

Une femme repasse les seins de sa fille. Crédit photo: Cameroononline
Une femme repasse les seins de sa fille. Crédit photo: Cameroononline

Je vais publier un billet sur mon blog aujourd’hui » (j’étais soudain pleine d’assurance)

– « Sur quoi ? »

« Je vais parler du repassage des seins ! »

Silence au bout de la ligne…Une chose qui ne nous arrivait pas souvent. On avait toujours des choses à se raconter. Moi, sur le Cameroun qui ne changeait pas et elle, sur cet autre pays où les étrangers étaient toujours étrangers, où elle ne se sentait pas chez elle. Le silence continuait et je ne savais vraiment quoi lui dire pour rompre ce moment semblable au bruit du cimetière … Un silence étranger à nos conversations habituelles.

– « Josie, c’est terrible ! Sais-tu ce qu’on ressent à la fin ? Sais-tu ce dont on se rend compte en grandissant, quand tes amies te disent que leurs seins n’ont jamais été repassés ? On a l’impression d’avoir subi un viol d’une autre façon. On se sent dépouillé, sali ! »

– « Mon Dieu ! Tu l’as aussi subi ? Oh seigneur ! »

(Trop d’images m’ont traversé l’esprit. Elle ne m’avait jamais confié ce secret. On était pourtant proche. Je me suis ressaisie : il y a des secrets qui ne sont pas ‘confiables’ )

– « Je ne suis pas la seule. Toi en écrivant ton papier tu y as pensé. Tu sais, je l’ai subi pendant plus de trois ans. Dès l’apparition de mes petits seins. C’est terrible non ? Maman est pourtant allée à l’école. Mais, ça ne l’a pas empêchée de me « masser » les seins. Comme de nombreux autres… Je n’ai même pas le courage de faire les tests du cancer des seins. Depuis que je suis ici, j’ai pourtant la possibilité de le faire. Mais, j’ai peur ! Et si j’ai cette terrible maladie Josie ? »

Nous avons parlé. Durant des minutes. J’ai essayé de lui parler. Nous avons longuement discuté. Reparlé. Nous nous sommes séparés avec cette peur au ventre. J’avais peur pour elle et pour les autres. Et si jamais si… ? J’ai alors repassé en séquences ces quelques informations que j’ai recueillies. Les mots de ces personnes que j’ai pu rencontrer.

Je n’ai jamais voulu parler de ce sujet trop sensible. Il me touche. Dans tous les sens, j’ai trop de victimes autour de moi. J’ai voulu me taire. Mais, que faire quand autour de toi, la télé, Internet, les magazines et autres qui vantent la beauté féminine, n’ont aucune influence chez certaines personnes qui continuent de se dire : « Les seins de ma fille ne doivent pas pousser très vite ! Il faut tout faire pour les masser ».

Un 21 mars 2014, je rentre d’un reportage avec une amie journaliste. Nous sommes dans un taxi. Et je lui demande si elle connaît des filles, femmes, dont les seins ont été massés ? Je lui explique alors que j’ai envie d’y consacrer un billet et peut-être un plus. Le silence s’installe entre nous. Je veux savoir pourquoi elle semble soudain perdue dans ses pensées. Pourquoi elle ne me répond pas.

« Est-ce que c’est une mauvaise chose Josie ? J’ai passé mon enfance en voyant les mamans masser les seins de leurs petites filles », me lâche-t-elle. Et elle insiste : « Est-ce mauvais Josie ? »  Elle attendait un « non » et j’ai plutôt dit oui. Elle a alors repris :

« Tu sais, j’ai grandi en pensant que c’était une bonne chose. Que c’était normal. J’ai grandi en croyant que ce n’était pas mauvais. J’ai grandi en voyant maman masser nos seins. Ceux de mes grandes sœurs. Oui Josiane. Maman l’a fait. Elle me disait que mes seins poussaient trop vite. A 10 ans, j’avais déjà des petits seins qui se formaient. Elle disait que ce n’était pas bon signe, que les hommes allaient trop me regarder. Elle a donc massé mes seins pour les diminuer. »

Le repassage est donc ça chers lecteurs ! Diminuer les seins de sa fille. Il faut surtout qu’aucun regard masculin ne puisse voir ces petits bourgeons se former. La petite fille aura ses seins, c’est sûr. Mais, lorsqu’elle sera plus grande. Quand ? « Lorsque diminuer deviendra impossible », m’a lâché une adepte du massage. « Et là, ma fille sera déjà grande. Elle pourra savoir les bons et mauvais hommes », a-t-elle poursuivi. Autour de moi, il y a tellement de victimes, tellement de femmes qui le pratiquent.

Paroles de pratiquantes

Moi, je ne comprendrai probablement jamais cet acte. Je ne le conseillerai jamais et je le combattrai avec ma dernière énergie. Malheureusement, toutes celles que j’ai rencontrées ont des raisons. Elles se disent qu’elles font une chose normale. Et mes petites leçons de morale se noient dans leurs raisons !

« J’ai cinq filles. Leurs seins ont été repassés. Mes filles n’ont rien eu de mauvais. Deux ont aujourd’hui des enfants. Moi-même, ma maman a repassé mes seins. Mes trois sœurs aussi. C’est normal. Repasser les seins de sa fille, ce n’est pas la mort. Les seins des enfants poussent trop vite. Les hommes sont pervers. Et c’est cette partie qui les attire le plus souvent sur les petites filles. »

Et à une autre de renchérir : « Je vois des femmes dire à la télé qu’il faut punir des femmes comme nous. Des femmes qui massent les seins de leur enfant. Je veux demander à ces femmes si elles sont contentes de voir leurs petites filles de 9 et 10 ans avec de gros seins ? Ces enfants sont exposés au viol. »

« C’est normal. Depuis des siècles, nos parents, grands-parents le font. On n’a jamais entendu parler de cancer de seins. Pourquoi maintenant ? Ma première fille a aujourd’hui 32 ans. Elle a deux filles et si elles ont des seins très tôt, je pense qu’on va les masser. »

Leurs instruments

Une pierre, des épluchures de bananes plantain et les feuilles d’un arbre « ngwollne » (je le prononce en ma langue maternelle) passées sur un feu à bois. Et les serre-seins aussi !

Dès que tout est bien chaud, on les passe sur des seins nus. On masse encore et encore. La petite fille, qui généralement croit que tout est normal, crie de douleur. Elle a mal. Mais, sa maman lui répète que tout va bien et que c’est pour son bien.

Certaines femmes après les massages mettent des serre-seins sur la poitrine de leur fille. Ce tissu, plein d’élastiques, sert à compresser les seins de la jeune fille, à les aplatir.

J’ai assisté à cet acte… Je m’en veux un peu de n’avoir rien pu faire. Mais, qu’aurai-je pu faire vraiment ? J’espère que mon billet pourra faire changer de mentalités, même si au fond de moi, je sais que le chemin est long !

Je veux juste dire à nos mamans, à nos tantines, à nos grand-mamans, laissez les seins de vos filles, nièces, petites filles, tranquilles. Nous vous appelons toutes mamans :

S’il te plaît maman, laisse mes seins tranquilles !      


«Je reviens de Bangui», morceaux choisis de vies brisées

Il exhibait le pied droit de papa. Il le tenait entre les bras. Il l’exhibait comme une coupe du monde. Comme un trophée de guerre. Le sang suintait de ce pied qu’il avait arraché à l’aide d’une machette. Tous ses vêtements avaient cette couleur rouge qui caractérisait la mort. Son sourire contrastait avec papa allongé à ses pieds. Le regard vide. Papa était en morceaux.  Papa avait crié. Je n’avais jamais vu papa crier. A un moment, il n’avait plus eu la force de crier, tant la douleur était grande. Je le voyais. J’étais couché en bas du lit, la bouche ballonnée par les mains de maman qui m’empêchaient de crier. Il avait pleuré. Je n’avais jamais vu papa pleurer. Des larmes rouges avaient coulé sur ses joues. Mais, ils avaient continué à découper papa avec la machette. Ils avaient continué à le découper, comme une cuise de poulet à table. Je reviens de Bangui.

Des Centrafricains fuient la guerre. Crédit photo: www.jeuneafrique.com
Des Centrafricains fuient la guerre. Crédit photo: www.jeuneafrique.com

Silence ! Un oiseau vole au lointain. Les bruits d’une moto rompent l’atmosphère.

Une autre voix reprend, hachée :

Je rentrais de l’enterrement de papa. On l’avait tué quelques heures plus tôt. On l’avait découpé dans la mosquée. On m’avait appelé en catastrophe. J’ai quitté ma maison. On a essayé de m’arrêter sans succès. Je voulais voir papa. Je voulais m’assurer qu’il était réellement mort. Non, je n’y croyais pas. Je suis allé. Et je ne l’ai reconnu que grâce à son bracelet qui ne l’avait jamais quitté pendant mes 41 années de vie. Il était parti. Son visage n’existait pas. On a dû recoller sa tête à son corps. Après son enterrement, j’ai voulu partir. J’ai repris le chemin de ma maison, l’âme perdue. En cours de route, je voyais des corps partout. Têtes, pieds, bras… ça et là sur mon chemin. Et soudain, je les ai vus. Ils pourchassaient des gens, armés de machettes, d’armes, des grenades. Ils les lançaient. J’ai été blessé et je me suis évanoui. Ils ont cru que j’étais mort.

Arrêt. Sous un soleil de plomb, ses sanglots me fendent le cœur.

Autre voix :

 Je ne sais pas ce que sont devenus papa et mes deux frères ainés. Ils ont tué Ali. C’est mon petit frère. Il avait seulement 13 ans. Lorsqu’ils sont venus dans notre maison, maman nous a cachés. Ils ont arrêté papa et mes deux grand-frères. Ils les ont conduits hors de la maison. J’entendais seulement leurs cris. J’entendais seulement leurs pleurs. Nous avons aussi vu du sang à l’entrée de notre porte. Beaucoup de sang. Je sais qu’ils sont morts. Mais, Ali ne voulait pas partir. Ils l’ont traîné sans succès. Ils ont été obligés de le tuer. Ils lui ont tranché le cou. Il est mort sur-le-champ. Avant de rendre l’âme, il a crié mon nom. Je l’aimais trop. Quand maman l’a mis au monde, j’avais cinq ans. On jouait ensemble. Quand quelqu’un me menaçait, il venait me défendre, malgré son jeune âge. Il disait toujours, comme je n’étais jamais allé à l’école, qu’il allait m’offrir une grande maison plus tard. Il est mort.

On ne parle plus. Des larmes ruissèlent sur son visage émacié.

Un témoignage :

On a pillé ma maison. Ils ont par la suite mis le feu dessus. Je suis allée me réfugier à l’église. J’ai dû fuir en pleine nuit. Je suis une veuve. Mon mari est décédé depuis 11 ans. J’ai huit enfants. Nous avons marché en pleine nuit jusqu’à la frontière. Je ne dors plus depuis des jours. Je me réveille toujours en pleine nuit. Je revois ces corps sur la route. Ces mares de sang. Je me demande ce que je je deviendrai demain. Et mes enfants ? Je suis sortie avec un pagne. Mes enfants n’avaient même pas de chaussures. Toute ma vie était dans notre maison.

Une voix enrouée par le chagrin. Un corps marqué par des coups reçus. A la machette et au couteau. Son regard me fait lâcher un instant mon téléphone portable. Je l’écoute. Cette maman a l’air fatiguée. Elle semble perdue :

Ma fille était enceinte. On l’a tuée avec son mari. Pourquoi l’ont-ils fait ça. Pourquoi ? Pourquoi ? Elle n’avait rien fait à personne. Elle était gentille, tu sais. Elle voulait toujours aider les autres. Elle était enceinte pour la première fois. Elle devait donner naissance à mon premier petit-fils. J’ai secoué son corps, tu sais ma fille. J’ai cru qu’elle pouvait se réveiller. Son cou était ouvert. Elle était morte. Son mari partait pour venger sa femme. Ils l’ont tué. Un coup de feu. Et il est aussi mort. Je ne sais pas comment j’ai fait pour arriver ici au Cameroun. Je veux aussi mourir. Mon fils avait fui depuis. Il m’a accueillie ici. Mais je veux mourir. Mourir.

Une larme coule sur ma joue. Je l’essuie discrètement et l’accueille. De sa petite voix entrecoupée de sanglots, elle regarde un point imaginaire au lointain :

Elle a retrouvé des morceaux du corps de papa dans la chambre. Ceux de ses trois frères aînés dans la cour de leur maison. Maman était morte depuis des années. Elle est seule au monde. Je ne l’ai aperçu. Elle partait pour une autre ville. A la recherche d’une vie meilleure. Elle est seule au monde.

J’ai aussi rencontré un autre, il avait fait de l’auto-stop de Bangui jusqu’à Douala. Il voulait tout faire pour quitter le Cameroun. Aller loin. Très loin même. Là-bas, quelque part au Maroc. Il a perdu des proches. Plusieurs…

Les histoires sont longues et nombreuses. C’est juste un échantillon. Des morceaux choisis de vies brisées que j’ai voulu vous faire lire…

Je ne sais comment vous exprimer ma reconnaissance

Je remercie des réfugiés centrafricains (mes frères et sœurs) qui malgré leur peine, ont accepté de partager avec moi ce qu’ils gardaient tout au fond d’eux, ces images d’horreur. Je loue leur courage. On s’est parfois rencontrés dans les locaux du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR à Douala, au consulat de RCA à Douala. Certains parmi vous, la voix hachée, le regard larmoyant, le visage émacié, acceptaient toujours de me raconter ces récits de vie. On s’est parfois rencontrés sous un soleil de plomb, dans ces rues bruyantes de Douala. Je me rappelle d’Awa, Mahmouda, Moussa, Jérôme, Idrissa, Mahmad, Sanko, Miriam… Vous êtes venus à moi, le cœur ouvert. Merci à tous. Je n’ai pas de mots !

Je remercie des Camerounais venus de RCA, mais que dis-je, des Centrafricains. Vous vous considérez comme tels. Après 10, 20, 50, 63 ans passés là-bas. Vous me l’avez dit. Je me rappelle plus particulièrement d’une nuit où je vous ai rencontrés au parking de l’aéroport international de Douala. Vous me racontiez alors ces horreurs qui m’ont fait lâcher prise, honteusement devant ce petit garçon de dix ans, qui revenait de ce pays « orphelin ». Son papa et sa maman avaient été tués, découpés, à la machette devant lui. Je me rappelle encore de tous les autres récits. Tout est encore vif dans mon esprit. Merci !

Merci à un homme (je préfère taire son nom) de l’ambassade du Cameroun en RCA. Je lui dis merci. Il a sacrifié son temps pour me faire comprendre le degré de cette crise qui a mon avis est une honte pour nous (sans distinction de race et de provenance). Elle n’a que trop duré. C’est lui qui m’a poussée, sans le savoir, indirectement, à écrire ce billet sous cet angle. Merci !

« L’homme fort est celui qui sait pardonner ».Baba Mahamet m’a lancé ces mots à la fin de notre longue conversation de cet après-midi au téléphone. On a pillé sa maison d’enfance et détruit tous ses souvenirs. Tout ce qu’on ne retrouve sur aucun marché de la planète. Tout ce qu’on n’achète pas, même avec tout l’or du monde. Malgré tout, il rêve, comme la majorité des réfugiés que j’ai rencontrés. Ils rêvent tous, sans exception, d’une « République centrafricaine unie et solidaire ». Et moi aussi !

N.B : Chers lecteurs, j’ai peut-être été violente dans mes descriptions, trop crue dans mes mots et trop brute dans mon récit. Je m’excuse auprès des âmes sensibles. Mais, je veux vous rassurer. Je n’ai rien inventé. Ce sont des récits de vie. Des confidences qui m’ont arraché des larmes et parfois même l’insomnie. J’ai juste pris des extraits de témoignages pour vous montrer et vous dire qu’il est temps d’essayer à son niveau, de trouver des solutions à cette crise.


Mr le président, en jouant avec la jeunesse, vous fabriquez des apprentis sorciers

Bonsoir Mr le président!

Comme j’aurais bien voulu vous souhaiter bon anniversaire, le cœur léger. Un peu comme une fille le souhaite tout en sourire à son papa. Vous avez 81 ans aujourd’hui. L’âge de tous les rêves. L’âge de la raison. L’âge de la joie absolue. Qui ne serait pas content d’atteindre cet âge ? Quel enfant ne crierait pas sur tous les toits du monde entier que son papa, grand-papa, arrière grand-papa a 81 ans ? Plus d’un demi-siècle. C’est une joie immense. Mais êtes-vous heureux ? Je ne saurais répondre à votre place. Ce n’est pas l’objet de ma lettre. Dans un pays honnête, bien dirigé, dans un pays sans corruption, je vous aurais envoyé une carte pour vous souhaiter bon anniversaire. Je sais qu’elle se serait perdue dans de nombreuses autres. Mais au moins, je l’aurais fait avec joie. Si seulement… Si… Trêve de parenthèses.

Paul Biya. Crédit photo: https://www.africa24monde.com
Paul Biya. Crédit photo: https://www.africa24monde.com

Mais, Mr le président, nous sommes au Cameroun. Le pays de tous les déboires. Le pays des déceptions. Le pays des mensonges. J’ai décidé de vous écrire. Je ne suis pas à la solde de votre parti politique, encore moins à la solde de l’opposition. Qui suis-je ? Ça n’a pas d’importance. D’où viens-je ? Non plus. Mais, ce que j’ai à vous dire est par contre important. Pour moi bien sûr. Je ne saurais parler à la place des autres. Cela fait plus de 72 heures d’horloge que j’ai suivi votre traditionnel message à la jeunesse. C’était le 10 février 2014. Comme chaque année, j’ai collé mon oreille à mon poste récepteur pour ne pas perdre vos paroles. L’année dernière à la même heure, je vous écoutais. Après vous avoir écouté, j’avais juré de ne plus jamais écouter. J’étais pourtant encore là en 2014. Pourquoi ? Imaginez Mr le président!

A la fin de votre discours, j’ai lancé : mais de qui vous moquez-vous ?

Comment ? Relisez vos discours, Mr le président. Que des irrégularités. Ce que vous dites me fait sourire. Pas en vrai. Mais en faux. Le 31 décembre 2013, dans votre discours de fin d’année, rien n’allait au pays…. Comment ces choses se sont-elles transformées en moins d’un mois pour devenir si roses ? C’est vraiment de la magie noire. Au pays des apprentis sorciers bien sûr.

Mr le président, dans l’un de vos discours, toujours à la jeunesse, à moi parmi tant d’autres, vous parliez de la gratuité de l’école. Est-ce le cas ? Je crie non. Les parents paient l’étude primaire, rien que ça, à double prix. Si elle avait été gratuite, il y aurait moins de délinquants dans cette République. Rien n’est gratuit Mr le président : il faut payer les frais d’Ape. Les frais d’informatique. Et apporter même un banc. Voilà pourquoi dans les rues du pays, les enfants, à peine sortis de l’enfance, sont des enfants-chargeurs. Enfants-porteurs… Et deviennent plus tard ces bandits de grand chemin. Pour dire juste, ces apprentis sorciers. Pourtant, l’éducation, ça fait plus de 14 ans que vous nous l’avez promise . Si je ne bénéficie pas de l’éducation de base, le minimum, que deviendrai-je demain ? Un apprenti sorcier, bien évidemment.

L’année dernière, vous parliez aux motos taximen. Vous leur parliez de formation. Pour faire quoi, Mr le président? Ce métier ? Ce sont des bacheliers, des licenciés, des diplômés niveau Master I, II. Ils sont à bord de ces motos. Ils sont sous le soleil. Ils subissent l’escroquerie de vos agents. Ils ne maîtrisent pas la route. Pas plus tard que la semaine dernière, près de 10 d’entre eux ont perdu la vie rien que dans la ville de Douala. Faites le total pour une année. La formation n’a jamais eu lieu. Et curieusement (j’ai sursauté à votre écoute), dans votre discours, j’ai entendu parler de leur formation effective. Par quel miracle Mr le président? Vous êtes le président.  Dans les rues, ces motos taximen étaient en colère après votre discours. Vous leur avez menti. Que deviendront-ils plus tard ? Des apprentis sorciers bien sûr.

Cette année, vous avez parlé de la création d’emplois. Je ne suis pas la seule à le dire. Mais, la réalité est loin de ce que vous nous avez raconté. Les jeunes souffrent. La formation n’y est pas. La corruption est devenue notre plaie. Elle sévit à tous les niveaux. Ce matin encore, mon voisin, qui est considéré au quartier comme le plus intello de tous m’a souri au passage. « Mais, de qui Paul Biya se moque-t-il ? », m’a-t-il lancé. Il jouait au ludo avec ses amis. Il n’est pas un oisif. Ce qu’il voit, il fait. Mais, le « job » ne s’obtient pas tous les jours. Le Cameroun, c’est comme les cailloux, me lancent-ils. En passant près d’eux, j’ai entendu leur langage : soutenu. Ils sont instruits. Ce sont les mêmes chercheurs d’emploi que je croise depuis des années. Que deviendront-ils plus tard ? Des apprentis sorciers bien sûr.

L’eau manque. La plus belle boisson au monde. Elle manque jusque dans les ménages, même pour les bébés venus au monde la veille. Que deviendront-ils demain. Eux qui sont abandonnés aux aurores par des mamans en quête du précieux liquide. Ils grandiront comme ça.  En voyant la réalité. L’électricité ? Les futurs diplômés ne savent plus quoi faire. Certains échoueront à leur examen. Et demain, faute de moyens, deviendront des apprentis sorciers.

Il est tard. Au loin j’entends une musique indomptée qui brise la nuit. Des jeunes, assis dans un bar, essaient de noyer leurs déboires dans un dernier verre. Je ne juge pas. Au Cameroun d’aujourd’hui, chacun tire son épingle du jeu. Mr le président, 81 ans, c’est aussi l’âge de la réflexion. Nous voyons bien que les « choses bougent au Cameroun » ! En 31 années de règne?

Bonne réception!


Cameroun: l’année 2014 sera-t-elle blanche ou noire?

2014! A chaque nouvelle année, les espoirs se déversent comme des vagues d’un océan dans les esprits. Chacun souhaite jouer sa partition dans les jours à venir. On espère alors que tout sera rose, mieux, blanc comme neige. On prie pour avoir l’ange dans sa vie. Mais, lorsqu’on est dans un pays comme le Cameroun, au lieu de rêver ainsi, on prend tout avec des pincettes. On franchit le pas de la nouvelle année comme si on allait en guerre. Rentrerai-je vivant ou pas? Ce sera blanc ou noir là-bas, au champ de bataille.

Au premier feu d’artifice du 1er janvier 2014 à 00h00 minute, ces pensées m’ont traversé l’esprit, j’ai eu cette attitude de guerrier, de manière inconsciente, comme tout camerounais. Je me suis posé à moi cette question: l’année 2014 sera-t-elle blanche ou noire? Ironique non? Je sais que ça traduit l’angoisse, la peur du futur et même à un certain niveau le pessimisme. Mais, quel camerounais n’est pas pessimiste à la fin?

2014! Les pendules réglées au Cameroun?
2014! Les pendules réglées au Cameroun?

Chez nous, on a pas de plan pour demain vous savez, mais pour 2035. C’est loin hein? Quand on a un président qui bat des records de longévité au pouvoir (31 ans), il y a de quoi s’inquiéter. Et 2013 me conforte dans mes pensées. Qu’est ce qui a marché durant cette année écoulée? Qu’est ce qui a changé? Difficile de répondre quand on voit qu’en 2013, rien n’a changé:

En 2013, le Cameroun dans la corruption

Le Cameroun est toujours corrompu. Il y a pourtant une lutte contre la corruption engagée par le président de la République. Toute une république est même emprisonnée (premier ministre, secrétaires d’État, ministres…): des milliards de F.Cfa sont détournés. Ça donne de sueurs froides aux jeunes chômeurs, sur-diplômés. Pas de quoi se réjouir de cette année 2014 qui s’annonce. En regardant l’année qui vient de s’écouler à travers ses faits, j’ai vraiment l’impression que rien n’a changé. Il y a eu des élections sénatoriales qui sont même entrées dans l’histoire. Mais, à quoi sert le Sénat dans un pays qui ne parvient pas à payer ses enseignants, ces donneurs de savoir, ces garants de l’avenir.  A quoi sert même à la fin cette soixantaine de ministres qui constitue le gouvernement du Cameroun? A interdire aux jeunes filles de ne plus montrer leurs ventres, seins et fesses dehors? (c’était malheureusement le message fort de quatre ministres, oisifs dépassés par leurs charges). Il y a mieux à faire pourtant!

En 2013, les enfants du  Cameroun étaient affamés!

Le bilan est alarmant: plus de 32,5% des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition chronique au Cameroun. Soit 3 enfants sur 10. Et en 2013, le problème n’a pas été résolu. Il aurait fallu pour cela booster l’agriculture. Mais rien n’a été fait. Les cultivateurs sont abandonnés. La banque agricole annoncée en grandes pompes, n’est pas toujours créée.

2013 et les éternels problèmes d’avant

Avant 2013, le Cameroun souffrait. En 2013, Paul Biya a dit que des choses allaient changer et des camerounais l’ont cru. La faute à ce rêve où nous nous plongeons pour fuir la cruelle vérité. Hélas ! L’eau potable est une denrée rare. Aussi rare dans certains quartiers du Cameroun que le diamant. L’électricité ? C’est l’autre grande promesse jamais tenue. 1990…2010…2013…Rien n’y fait, l’obscurité ne nous fait plus peur. Avons-nous le choix ?

2013, toujours des promesses…jusqu’à l’horizon…

2035. Le pouvoir en place s’accroche à cette année lointaine comme un capitaine en plein naufrage s’accroche à son gilet de sauvetage. L’économie décline, tout sera en ordre en 2035. La pauvreté avance, tous les camerounais seront riches en 2035. La corruption s’implante, l’honnêteté reviendra en 2035. Malheureusement, l’enfant ne marche pas sans apprendre à ramper. Pareil pour le Cameroun où son dirigeant pense qu’il suffit de tout programmer en 2035 pour se construire une conscience tranquille. 2035, c’est long et surtout c’est assez lointain pour berner les crédules. « 2014, C’est trop proche…Il faut penser à 2035. Pensez à vos enfants. Construisons leur avenir ». C’est leur pensée.  Avec ça, ils sont sûrs de tromper les optimistes et d’amadouer les pessimistes. 

Faire le bilan sombre de l’année 2013 est impossible tant l’année écoulée a été souillée de corruption, de pauvreté et de cet espèce de statut quo bizarre qui n’avance pas, mais recule de manière silencieuse

Je prie pour que l’année 2014 soit blanche au Cameroun. Mais sans vous mentir, avec le récent discours du 31 décembre de Paul Biya, je ne rêve pas trop. Bonne et heureuse année 2014 chers lecteurs. J’espère que cette année vous apportera ce qu’il y a de meilleur dans votre vie.


Stop, arrêtez tout, Paul Biya arrive !

A l’heure actuelle, j’ai l’impression d’être une inconnue dans mon pays. J’ai l’impression d’être « l’autre », celle qui vient d’ailleurs, d’une autre ville que Douala, d’un autre pays que le Cameroun. Vous savez, ce n’est pas difficile de connaître la cause. Il s’agit même d’un jeu d’enfant. Paul Biya vient à Douala. Quoi ? Je répète : Paul Biya, notre président de la République, vient à Douala !

Arrivée de Paul Biya: "Cameroun24.net"
Arrivée de Paul Biya: « Cameroun24.net »

-Et alors, me répondra sûrement un  étranger, quelqu’un qui n’a que faire de cette visite. C’est normal qu’un président visite ses villes non ?

Si je vous disais qu’on compte ses visites, en 31 ans au pouvoir, dans la ville où je suis née?Quand Paul Biya vient à Douala, c’est tout le problème. C’est plus qu’un problème, c’est un scandale. Pourquoi ?

Hier, 19 heures 30 :

Je suis dans un cargo. Tout le monde bavarde. Paul Biya est mauvais. Samuel Eto’o doit marquer le 17. Mon voisin qui raconte ses petits déboires. Les petits malfrats du quartier qui volent ses porcs. Sans sa vigilance, ils lui auraient bien dérobé toute sa seule richesse. Tout ça, c’est la faute de Paul Biya qui refuse de changer son régime. Ennuyée et épuisée, je pose ma t Biya qui refuse de changer son régime.es raisons!s bavardages ête sur le dossier plein de fer de mon siège. L’embouteillage aidant, j’ai même somnolé. Et soudain, silence ! Ça c’est pas l’habitude d’un cargo. Je sursaute et lève la tête. Que vois-je ? Un, deux, trois, quatre… camions remplis de militaires. Ils défilent à tour de rôle à toute vitesse.

-Celaa sent l’arrivée de Paul Biya, lance un passager pour rompre le silence.

67 minutes plus tard (sur une route où je mets habituellement 20 minutes maximum), je suis arrivée.

Aujourd’hui :

7 heures 15 minutes :

Il y a des policiers. Dieu qu’ils sont nombreux en route. Et aussi des gendarmes et même des militaires. Ils sont placés non loin du grand carrefour d’à côté. Je dois sortir. Je dépense deux fois le prix de transport habituel à cause des embouteillages. J’emprunte deux taxis.

-Ma fille, il faut rentrer aujourd’hui au plus tard à 18 heures hein ? me supplie presque mon 1er chauffeur.

-Pourquoi papa ?

-Mais ma fille, hier, près de 25 gendarmes sont arrivés dans mon quartier. Ils contrôlaient tout le monde. Ils ont surement arrêté des gens, dit-il d’un ton de confidence. Ils sont nombreux dehors !

Comme si cela ne suffisait pas, il me raconte ses déboires. A Bonanjo, centre administratif de Douala, des rues ont été fermées. Il ne peut plus gaspiller son carburant. Il doit garer son véhicule. Mais, il ne sait avec quoi il va nourrir sa famille. Paul Biya vient, et c’est tout !

12 heures 30 :

Je suis non loin du pont sur le Wouri. La route a été barrée, non loin de la tribune qui doit accueillir notre roi lion. Il y a des forces de l’ordre. Des élèves, papa, maman, pépé, mami, marchent à pied. Hypertendus, diabétiques… Paul Biya arrive. Stop , on marche à pied !

14 heures :

Je rencontre des étudiants dans des services administratifs. Il faut toujours faire des concours, on ne sait jamais. Le problème ? Ils sont venus signer des documents. Ceux qui devaient le faire ne sont pas là. Où sont-ils ? Mais, faire des préparatifs. « Tu ne sais pas que Paul Biya vient ? », te réponds une secrétaire, parfumée, vernie, qui n’attend plus que son heure pour rentrer. La jeunesse, c’est l’avenir. Mais, peut-être que ce concours était leur chance. Si non, demain, ils seront irrécupérables. Mais, rien n’y fait : Paul Biya vient, on arrête tout !

17 heures :

Au téléphone. C’est mon cousin qui croit toujours que je connais des choses que personne ne connait: « S’il te plaît Josie, est ce que demain est un jour férié ? ». Etonnée, je demande pourquoi : « Mais, mon prof m’a dit qu’il ne venait pas demain parce que Paul Biya vient », me répond-t-il presque énervé. Je dis non et il raccroche en disant que pour une fois, je ne connais vraiment pas tout.

18 heures 13 minutes :

Un ami est prêt. Il rentre chez lui. J’ouvre des yeux étonnés. Il rentre toujours le dernier, afin, presque. « J’habite à Bonaberi. On nous a dit qu’on allait fermer la route d’un moment à l’autre. Dès minuit et jusqu’à 14 heures demain, personne ne passera. Demain, je ne serai pas là ». Merde ! J’ai juré. Tout ça à cause d’une visite présidentielle ? Oui, Paul Biya arrive. C’est ça, on arrête tout ! …

Chers lecteurs, voilà mes raisons. Paul Biya vient. Le roi lion arrive. Il y a des policiers dans la ville. Des militaires, la garde présidentielle même. Toute la ville prépare cette venue. Tout est paralysé.  Et tout ça, pour la pose des 1ères pierres du 2ème pont sur le Wouri et de la centrale à gaz. Stop, arrêtez  tout, Paul Biya arrive !

impression d’e, j’ous ai parlé iavel pour mieux comprendre la psychologie du roi.